L’homme de la situation

Pour la centième fois de la nuit, l’homme marchait de long en large dans la petite chambre. Il ne lui restait plus aucune larme à pleurer.  

Un sentiment confus de vide et de mal-être remplissait le fond de ses entrailles. Il s’assit lourdement devant la table massive et se cacha le visage dans le creux de ses mains calleuses, durcies par le labeur. 

Comment cela était-il possible ? Au cours de la journée, sa douce Marie venait de lui porter un coup de poignard fatal dans le cour en lui annonçant qu’elle était enceinte. Et ils savaient tous deux que l’enfant n’était pas de lui !  

Qu’est-ce qui avait donc pu arriver ? Marie n’était pourtant pas comme ça. Il l’a connaissait bien. Jamais elle n’aurait pu faire une chose pareille ! Elle ne pouvait pas violer ainsi leurs fiançailles.  

Mais elle était bel et bien enceinte et il n’y avait pas d’autre explication logique et rationnelle. 

Il avait fini par s’allonger sur son lit, un bras replié sur ses yeux. Son cerveau fiévreux cherchait quoi faire. Il pouvait ruiner sa réputation, la livrer à l’opprobre publique.  

Et s’il ne le faisait, il lui faudrait partager sa honte parce que les gens en concluraient, en toute logique, que l’enfant était le sien et que tous deux avaient désobéi à la loi de Dieu. 

Il essaya tant bien que mal à se convaincre qu’il allait la punir, mais il savait qu’il ne le pourrait pas. Même à son pire ennemi, il n’aurait infligé pareil scandale. Il ne lui restait plus qu’à trouver une manière honorable de rompre discrètement les fiançailles. Elle pouvait aussi cacher la chose. 

Puis, il tomba dans un sommeil agité. 

Des images confuses de ces horribles dernières heures revenaient sans cesse dans ses rêves, tournoyant en de méchantes volutes de fumée. Petit à petit, pourtant, il prit conscience d’une lumière qui se mit à brûler de plus en plus intensément en lui, jusqu’à ce qu’il discerne un … Un quoi ?  

Un ange ! 

L’ange s’adressait à lui depuis le centre de la lumière. La souffrance fulgurante de cette journée se mit à fondre au fur et à mesure qu’il devenait conscient de la présence bienfaisante de Dieu. 

 » Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre avec toi Marie, ta femme, car l’enfant qu’elle a conçu vient du Saint-Esprit; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.  » (Matthieu 1:20, 21) 

Joseph se réveilla d’un coup. Etait-ce un rêve ? Quel rêve ! Il l’avait vu avec tant de clarté. Dieu avait parlé au milieu de sa confusion. A quelque part, tout ce qui était en train d’arriver s’inscrivait dans son grand projet.  

Le prophète n’avait-il pas annoncé :  » Voici, la vierge sera enceinte ; elle enfantera un fils et on lui donnera le nom d’Emmanuel, ce qui signifie : Dieu avec nous ?  » (v. 23) 

Dieu  avait besoin d’un homme d’envergure pour épouser une femme de foi et d’obéissance telle que Marie. Il avait besoin d’un incroyable coeur d’amour et de protection pour prendre soin de cette petite flamme de salut qu’Il allait donner au monde. 

Ce grand homme, Dieu le trouva en la personne du charpentier de Nazareth.